top of page

"Dernier été à Paris" de Abha Dawesar

Amour de l'art. Art de l'amour.


Prem Rustum est un grand écrivain mondialement renommé, avec à son actif de nombreux prix littéraires dont le le Prix Nobel de Littérature. Sa méthode de travail, inchangé depuis ses débuts, a même intéressé des scientifiques. Ses inspirations, les femmes : femme inceste, femme adultère, femme chanteuse, filles-femmes, ... et admiratrice maladive. Contrairement à Pascal, le français, un autre grand écrivain et ami, Prem est connu et critiqué comme celui, malgré ses aventures, qui aborde que de manière très plate les relations sexuelles dans ses romans. À soixante-quinze ans, Prem a passé sa vie à écrire, il commence à penser à la mort, il repense à sa vie qui lui a filé entre les mains, il veut poser un peu sa plume et profiter de la vie. Justement, Pascal lui a raconté qu'il a rencontré des femmes juste en saisissant son nom dans un moteur de recherche sur internet et un jeune écrivain débutant, rencontré à un dîner et lui ayant transmis ses nouvelles pour une éventuelle publication, avait mentionné son expérience des sites de rencontres en y précisant leurs noms.

Prem a un ordinateur, et malgré son statut de débutant sur ce genre de machine, il réussit après de longs efforts à s'inscrire sur un site de rencontres, où il aborde directement une femme passionnée par ses œuvres et sa carrière, Maya, 25 ans. Quand Prem rencontre cette femme, il est totalement subjugué par son charme, décide de ne pas la laisser filer et de se rendre à Paris comme elle pour l'été. Prem aime cette ville, où il a un pied-à-terre, il n'avait pas songé à s'y rendre cette année, mais savoir Maya dans cette ville est une bonne opportunité, il pourra aussi rendre visite à son ami Pascal, flâner dans ses rues et visiter les musées. Au cours de cet été, Maya apportera inconsciemment à Prem une confrontation directe avec sa mortalité mais lui fera également connaître un nouveau désir par l'éveil de nouvelles aspirations tout en ravivant les anciennes très douloureuses. Prem veut aimer cette fille énigmatique mais ne veut pas connaître une relation similaire à ce qu'il a connu précédemment et qui ont inspiré ses romans. Il ne veut pas bousculer et brûler les étapes, d'autant qu'à soixante quinze il ne sait pas s'il peut encore rendre une femme heureuse, avec le risque de la quitter du jour au lendemain en rejoignant la mort. Prem et Maya pourront-ils concilier leur différence d'âge et leur écriture, et ainsi découvrir le véritable amour ?


"Dernier été à Paris" est un roman étrange et enivrant, en son cœur Paris, le Paris des écrivains, des arts, de ses ruelles de Montmartre ou du Marais, de ses restaurants et de ses bistrots, des amis et des amours, de ses musées, ses parcs et de ses monuments. Certes un Paris très cliché, mais un décor parfait pour ce roman, ode à l'amour et aux arts. Le roman nous fait également voyager à New-York, la Normandie, le Sud de la France et l'Inde avec Bombay et Delhi. Tout s'y mélange, art et sexe, littérature et amour, amitié et ambition, la vie et la mort, la gastronomie et la jouissance, la vieillesse et la jeunesse, la santé et la maladie. Y sont partagés, souvenirs de jeunesse, amours interdits, le temps qui passe inévitablement, la mélancolie incomplète des des choses essentielles, les espoirs à passer à des choses plus pragmatiques, la mort, relation sans lendemain, ... Je ne vous cacherais pas que le livre contient des passages très crus et très détaillés sur les relations sexuelles et vous en trouverez sur tout le long. Mais au fond, à bien y réfléchir, ce n'est pas ce que font des amis lorsqu'ils parlent de leur vie privée ? Abha Dawesar ose parler des sujets que l'on n'a pas l'habitude de voir mentionner dans les romans, et celui-ci ne fait pas exception, bien au contraire elle en a accumulé un bon nombre : sexualité, libertinage, homosexualité, inceste, l'impuissance, le désir sexuel des séniors. Je trouvais très lancinante, cette relation entre Prem et Maya qui prend un long moment à évoluer, difficile à imaginer au vue du passé de Prem et des aventures de Maya, et sincèrement à plusieurs moments, j'avais envie de les secouer afin qu'ils prennent enfin une décision, d'autant que la fin est très brusque. Heureusement, les souvenirs revenant à la mémoire des personnages, principalement les souvenirs de Prem, très forts et très sensuels, permettent de découvrir une nouvelle histoire dans le récit. Abha Dawesar nous offre de beaux moments de partage : la viste du Musée d'Orsay par Maya et Prem, le Mont-Saint-Michel par Pascal et Prem et la visite du petit-fils indien Ratan à Paris chez son grand-père. "Dernier été à Paris" est, à des détails près, un roman intéressant et original. Les tâtions et les prudes ne trouveront pas de plaisir à le lire, ni la patience. C'est un roman qui départagera bon nombre de ses lecteurs, je fais partie de ceux qui ont apprécié cette idylle d'abord intellectuelle et qui peu à peu devient charnelle, dans un Paris romancé.



Un désir chargé de sentiments qu'il était incapable de décrypter avec précision ou d'analyser à la lueur de son passé, un passé amoureux fait de deux femmes : Meher et Angie. Meher, seule à recevoir ses désirs d'adolescent, amour entre frère et sœur, dévotion et aussi parfois, lorsqu'ils étaient ensemble, le maître, l'adulte, la grande sœur protectrice. Ces distinctions que les autres apprennent, admiration et concupiscence, amour platonique et amour filial, maître et élève, jeune et vieux, amie et sœur, l'absolu et le partiel, tout cela était vide de sens pour Prem. L'univers qu'il avait partagé avec Meher était organique, entité vivante pleine de souffle, qu'on ne pouvait fractionner en toutes ces catégories, pas plus qu'on ne pouvait réduire un chiot à un cœur, un cerveau, une langue et une queue.
page 34

Il portait une chemise bleue et, pliée avec soin, une écharpe en soie, d'un bleu plus soutenu. Le gris de son épaisse chevelure argentée avait un reflet métallique, assez voisin de celui des tours en acier de Manhattan. Le contraste avec sa peau brune était saisissant. Prem, jeune, avait pu paraître exotique et gentil, mais aujourd'hui son apparence était tout à fait saisissante. Son visage était non seulement ridé, mais aussi émacié et très anguleux. Son nez, l'élément le plus remarquable de son visage, était toujours fier, noble, un nez d'empereur romain. Globalement, un bel homme.
Page 44

Il avait l'impression d'être en bouteille de jus de fruits, avec un dépôt solidifié au fond. Rencontrer cette fille agiterait un peu ce dépôt. Il en retirerait peut-être quelques lignes pour son prochain roman qui refusait de décoller. En tous cas, il avait peu à perdre. S'il ne la trouvait pas assez délicieuse, il n'aurait qu'à faire un signe au chauffeur et s'en aller.
Page 69

- [...] Et puis, problème plus vaste, j'essaie d'écrire sur l'Inde sans être liée réellement au pays. Mes efforts sont voués à l'échec. Pire encore, mon dernier voyage en Inde, mes notes, mes souvenirs, mes détails - ces petits riens si simples qui insufflent de la vie à un roman -, tout est envahi par le souvenir de vos romans. Tout le temps que j'ai passé là-bas, je vous ai lu, et je ne parviens pas à séparer ce que j'ai éprouvé dans tel ou tel lieu de ce que j'éprouvais intérieurement à cause de ce que je lisais !
Page 164


 

Dernier été à Paris De Abha Dawesar Titre original : That Summer in Paris Roman traduit de l'anglais (Inde) par Laurence Videloup Éditions Héloïse d'Ormesson - Date de parution : 6 mai 2008 - ISBN : 978-2350870816  - 399 pages - Prix éditeur : 23 € Éditions 10-18 - Collection : Domaine étranger - Date de parution : 1er juillet 2010 - 439 pages - Prix indicatif : uniquement en occasion #éditionshéloiïsedormesson #héloïsedormesson #abhadawesar #éditions1018 #littératureindienne #auteurindien #auteursindiens #romans #laurencevideloup

Comments

Rated 0 out of 5 stars.
No ratings yet

Add a rating
bottom of page